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| L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett | |
| | Auteur | Message |
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Haydée Star-crossed lover
| Sujet: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett Dim 6 Jan - 10:40 | |
| J’ai lu L’excellence de nos ainés d’Ivy Compton-Burnett (1884-1969) qui m’a laissé plusieurs fois perplexe au cours de ma lecture. Et après l’avoir refermé je n’arrivais toujours pas à savoir si j’aimais ou non. Et je trouve que c’est un exercice extrêmement rude que de livrer ses impressions sur ce roman. Il est disponible chez Phébus avec une jolie couverture (ce qui ne gâche rien) : L’excellence de nos ainés est un huis clos dans le cercle familial (c'est plutôt fréquent chez ICB, je crois), lieu de toutes les horreurs et des pires atrocités (oui c’est redondant mais ce n’est pas de trop). Cela raconte l’histoire d’une famille (père veuf et ses enfants dont les âges vont de la trentaine à 13 ans, plus une gouvernante, une cousine, deux domestiques) qui déménage pour se rapprocher d’une branche de la famille (les sœurs du père, l’une étant très malade) . Ma première surprise a été la forme du roman. Il y a énormément de dialogues ! Et avec ça, il parait que son style avait un peu changé, entre celui-ci et des précédents romans encore plus dialogués. Ce qui est intriguant c'est que ces dialogues sont tout aussi incohérents et sautant du coq à l’âne que peut l’être une conversation réelle. Dans les romans, on a plutôt tendance à faire de jolies conversations très décoratives qui ne sont pas tellement semblables à celles qu’on peut avoir dans la vie. Digressions, lourdeurs, répétitions n'y ont pas leur place en théorie. Eh bien si ! Ici en tout cas c’est tout à fait ça. Ils sont capables de disserter dix minutes (tant est qu’on puisse évaluer le temps qui s’écoule lors d’une discussion dans un roman) sur un point absolument inintéressant en apparence (le fait d’être 13 à table, par exemple, qui risque de porter malheur au premier qui s’assiéra. Et les personnages palabrent pour savoir qui veut bien se sacrifier) et l’on se demande où l’auteur veut en venir. Elle révèle plein de choses sans avoir l’air d’y toucher. Tout est noyé dans un flux continuel de paroles à vous donner la migraine. Ensuite, la fin m’a laissé sur ma faim. J’ai pensé « Et après ? ; qu'est ce qu'elle veut dire avec ce récit ? ». C’est un peu comme si elle ravageait tout sur son passage genre cataclysme, ouragan, bombe atomique ou ce que vous voudrez et qu’elle tire sa révérence après ça. Ayant juste fait voler en éclats tous les faux semblants, révéler la noirceur des âmes et pousser le lecteur à haïr ses personnages . J’ai tellement détesté Anna, (je l’ai vraiment eu en horreur, je vous assure, c'était très violent) qui est un peu le personnage principal (ou disons qu’elle en prend la place d’autorité ce serait plus juste ainsi) que j’ai eu envie d’arrêter ma lecture tant elle est ignoble. Bref, ICB dévaste et laisse dans l’état. Ce qui est assez déstabilisant c’est qu’ au sein de la famille les personnages ne subissent pas particulièrement de déconvenues quant aux caractères des uns et des autres. Ils se découvrent un peu, s’étonnent de certains tempéraments qui se révèlent mais ne tombent pas non plus des nues. C’est vraiment davantage le lecteur qui a droit à une radiographie des personnages mais les monstruosités n’éclatent pas au grand jour. Celui qui s’en prend plein la vue, c’est le lecteur. C’est très surprenant et très déconcertant mais en même temps c’est aussi très réjouissant parce qu’elle ose faire de ses personnages des monstres aux ambitions inavoués, complètement refoulés qui, si on leur donne la possibilité, sont capables de tout et du pire. Odieux et amoraux. Elle a une plume un peu alambiquée parfois, et surtout très venimeuse mais de façon pernicieuse, parce qu’en apparence elle décrit plutôt froidement ses personnages, sans empathie ni dégoût (d'autant plus qu'elle les fait surtout parler). Et ils en sont encore plus répugnants du fait de cette présentation neutre qui laissent au lecteur juger de leur degré d’ignominie, en fonction de sa propre moralité pourrait-on dire. Elle est aussi parfois incroyablement drôle. Il y a tout un dialogue avec une histoire de gare et de valise indélicate dénuée de savoir vivre qui m’a fait vraiment rire d’autant plus que, comme pour tous les dialogues, on ne se contente pas d’avoir un échange court et vif, percutant dans sa brieveté. Nenni ! On a un pan entier de discussions qui s’étire à n’en plus finir jusqu’à ce qu’un des personnages soit lassé de cette discussion et demande qu’on passe à autre chose. ICB n’épargne rien à son lecteur et c’est vraiment très spécial. Mais loin d’être inintéressant ! |
| | | Emjy Bookworm
| Sujet: Re: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett Dim 6 Jan - 12:05 | |
| Merci pour ce sujet, Haydée. ICM (je vais moi aussi l'appeler comme ça ) est un auteur qui me rend curieuse depuis des années. J'ai Une Famille et une fortune depuis plus d'un an dans ma PAL et je ne l'ai toujours pas ouvert. Peut-être que cette année, je sauterai enfin le pas. Ce que tu dis de cet auteur (en particulier pour ce qui est de ses dialogues) m'intrigue et me donne envie de la découvrir. Certains aspects que tu évoques me rappelle un autre auteur, Elizabeth Bowen. Je ne sais pas si la comparaison est pertinente mais je me souviens avoir été déstabilisée par Les Petites filles un peu pour les mêmes raisons que toi pour L'Excellence de nos aînés. _________________ |
| | | Haydée Star-crossed lover
| Sujet: Re: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett Dim 6 Jan - 13:23 | |
| Contente que le sujet t'intéresse, Emjy ! Moi aussi, j'ai une famille et une fortune ; on pourra échanger nos impressions ! J'ai déjà tenté Elizabeth Bowen. Les petites filles m'intéressait beaucoup mais j'avais finalement acheté un monde d'amour et je l'ai abandonné très rapidement...Je pense qu'ICB est meilleur écrivain ! |
| | | Akina Bookworm
| Sujet: Re: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett Dim 6 Jan - 16:30 | |
| Tu attises beaucoup ma curiosité, en particulier quand tu parles du style. |
| | | Julia Jalna Ecrivain en herbe
| Sujet: Re: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett Dim 6 Jan - 23:21 | |
| Merci pour ton avis très intéressant Haydée ! J'ai encore plus hâte de lire L'Excellence de nos aînés. J'ai également Une Famille et une fortune dans ma pile à lire, c'est chouette on va pouvoir en discuter. Je vais mettre ci-dessous mon avis sur Frères et Sœurs car il rejoint beaucoup celui de Haydée. Mais si jamais vous pensez qu'il vaut mieux lui attribuer un titre à part entière, je l'éditerai. |
| | | Julia Jalna Ecrivain en herbe
| Sujet: Re: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett Dim 6 Jan - 23:39 | |
| Frères et Sœurs, 1929 (lu en 10/18)
Ivy Compton-Burnett raconte ici l’histoire de la famille Stace en deux temps. Tout d’abord, le mariage de Mrs et Mr Stace, puis, 25 ans plus tard, à la mort du mari, la vie de sa veuve Sophia, se retrouvant seule avec ses trois grands enfants, Andrew, Dinah et Robin. La famille se retrouve confrontée à un lourd secret de famille qui va compliquer leur relation et celles d’avec leur voisinage composé de quatre couples de frères et sœurs.
Étant donné que la trame du roman est basée sur la découverte du secret de famille et sa "gestion", je préfère ne pas en dire beaucoup plus sur l’histoire pour ne pas gâcher le plaisir de la lecture.
Les Stace sont une famille aisée et éduquée qui possèdent un domaine. La mère Sophia est présentée comme une femme de caractère, abusive et responsable du malheur de ses enfants, élevés par la gouvernante Patty. L’auteur nous met devant ce fait mais ne nous explique rien. Elle préfère laisser parler ses personnages.
En effet ce roman est quasiment composé que de dialogues que j’ai trouvés très particuliers. Je rejoins le point de vue d’Haydée à ce sujet, mais je rajouterai, pour ce roman là, que le style n’est pas toujours totalement parlé. Parfois, un personnage va exposer un sentiment des plus profonds à son interlocuteur au détour d’une porte, sans entrée en matière telle qu’on l’aurait fait dans la vraie vie. Se dégage de ce procédé une ambiance très étrange, un ton général plutôt froid, c’est vraiment déstabilisant. Par certains côtés, cela m’a rappelé cette image que l’on peut avoir d’un certain théâtre contemporain où les acteurs, figés, dialoguent sans se regarder sur un ton monocorde. Il faut dire que l’auteur ne fait pas de cadeau à ses personnages, il est difficile de leur trouver des qualités. Ils sont froids, égoïstes, égocentriques, impassibles et finalement ne ressentent pas grand chose. Une espèce de résignation morne qui m’a personnellement déprimée.
C’est un livre extrêmement noir, étouffant, sans concession envers l’humain, d’un pessimisme inouï, car elle montre plusieurs générations qui deviennent de plus en plus égoïstes, sans ambition, dans l’impossibilité même de se reproduire. De plus l’auteur n’explique rien et donc ne cherche pas à trouver d'excuses aux comportements de la mère ou des enfants. Ils sont tels qu’ils sont parce qu’ils sont. Elle n’épargne vraiment personne.
Malgré toute cette lourdeur ambiante, Ivy Compton-Burnett arrive à nous faire marrer ! Si, si. Par la cocasserie de certaines situations, par son ironie et par son humour so british. Par ailleurs, elle évoque des sujets délicats, tels que l’inceste comme peut le faire pressentir le titre du livre (et surtout le quatrième de couverture), mais de façon toujours très subtile, pas racoleuse du tout.
La lecture de se livre m’a vraiment déconcertée. Lorsque je l’ai terminé, je n’ai pas pu dire tout suite si je l’avais aimé. Et puis, il n’a pas arrêté de me hanter, j’y pensais sans cesse et plus le temps passait, plus je réalisais la maîtrise de l’auteur. Pour moi, c’est vraiment un livre qui compte, sa vision du monde m’a beaucoup touchée et j’ai vraiment eu le sentiment d’être devant un très grand écrivain.
Pour terminer cet avis, je vais noter quelques éléments biographiques qui me semblent éclairant sur son œuvre :
Biographie "Romancière de la première moitié du XXe siècle, anoblie par le reine Elizabeth II peu de temps avant sa mort, ICB est un écrivain très apprécié notamment par Nathalie Sarraute, Rosamond Lehmann, Elizabeth Bowen, Angleo Rinaldi et Hector Bianciotti. En marge des courants littéraires de l'époque, son œuvre, forte de près de vingt romans, apparaît comme l'une des plus singulières de la littérature anglaise du XXe. Fille d'un médecin renommé et aînée d'une fratrie de sept enfants, sa vie fut très tôt marquée par de nombreux drames familiaux. La mort de sa mère, le remariage de son père, puis la disparition de celui-ci, le décès de deux de ses frères et le suicide collectif de ses deux sœurs eurent une influence certaine sur les thèmes développés dans ses ouvrages. Installée à Londres avec sa compagne, la journaliste Margaret Jourdain, au milieu des années vingt, elle y passera dans l'ombre les quarante dernières années de sa vie." (bio venant de Phébus) |
| | | Zahlya Ironic Dandy
| Sujet: Re: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett Lun 7 Jan - 10:11 | |
| Ça m'intrigue, mais je crois que je vais passer mon tour pour le moment vu l'ambiance des romans En tous cas elle a pas eu une vie facile, perdre ses parents, deux frères et deux soeurs, c'est juste horrible |
| | | Emjy Bookworm
| Sujet: Re: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett Jeu 10 Avr - 18:01 | |
| Encore une sortie poche intéressante chez Points Seuil : Je trouve la couverture très élégante |
| | | Miss Virginia Bookworm
| Sujet: Re: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett Jeu 10 Avr - 18:04 | |
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| | | Akina Bookworm
| Sujet: Re: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett Dim 13 Avr - 14:35 | |
| La couverture est pleine de charmes ... |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett | |
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| | | | L'excellence de nos aînés (1944), d'Ivy Compton-Burnett | |
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