Autopsie d'un meurtre est un film d'Otto Preminger. Le film dure 2h30 (mais on ne les voit pas passer). C'est l'adaptation du roman éponyme de Robert Traver, pseudonyme d'un juge nommé John D. Voelker. Les éditions Gallmeister ont réédité 2 de ses recueils de nouvelles, mais pas Autopsie d'un meurtre qui est à ce jour épuisé.
Le film est nommé pour 7 oscars, mais n'en obtient aucun (1960 est l'année de la razzia de Ben Hur) en partie à cause d'un de ses sujets principaux (le viol).
Paul Biegler (James Stewart) est un avocat plus ou moins retiré des affaires qui préfère passer ses journées à la pêche. Quand Laura Manion (Lee Remick) appelle pour que Paul prenne en charge la défense de son mari, son ami Parnell McCarthy (Arthur O'Connell) lui dit d'accepter l'affaire alors même que Paul ne connaît pas les tenants et les aboutissants.
Frederick Manion (Ben Gazzara) a tué Barney Quill, un patron de bar qui a violé sa femme. Paul décide de plaider non coupable en faisant appel à un psychologue.
Les acteurs sont tous absolument formidables. Ceux qui pensent que James Stewart n'est qu'un acteur de comédies devraient regarder ce film où à mon avis, il méritait bien plus l'Oscar que pour Indiscrétions.
Les seconds rôles ne sont pas en reste. L'adjoint du DA interprété par George C. Scott lui offre une opposition passionnante au moment du procès, chacun essayant de rivaliser de rouerie pour piéger l'autre.
Ben Gazzara est parfait en accusé coupable qu'on n'a pas vraiment envie de défendre mais plutôt de lui mettre une claque.
Lee Remick est aussi formidable en femme fatale.
C'est un film de procès qu'on peut juger classique surtout parce qu'on en a vu tant d'autres depuis. Mais pour moi il se distingue en particulier sur deux aspects.
Tout d'abord, la mise en scène. J'ai été frappé par les mouvements de caméra et la mise en scène au cordeau. Cela ne devait vraiment pas être évident pour les acteurs d'être toujours bien placés tout en jouant de manière aussi intense. Le temps consacré au procès est assez long (entre une heure et une et demie je pense) et pourtant, je ne sais pas s'il y a un seul mouvement de caméra qui est le même qu'un autre. Parfois, elle suit les interprètes, parfois elles les précédent, mais toujours la scène se termine par le fait que plusieurs acteurs se retrouvent dans le cadre. C'est vraiment un chef d'oeuvre. Otto Preminger se permet même de jouer avec cet aspect puisqu'il filme James Stewart essayant d'apparaître dans le champ de la caméra en fait dans le champ visuel de Lee Remick tandis que George C. Scott fait tout pour se placer devant lui.
Autre point qui m'a particulièrement interpellée, c'est le féminisme de ce film. Sans doute que Otto Preminger ne l'a pas fait en pensant que son film serait toujours moderne sur ce point 60 ans plus tard.
Le personnage de Lee Remick est présentée comme une séductrice avec les caractéristiques de la femme fatale traditionnelle (séductrice, manipulatrice, dissimulatrice). Il n'empêche que malgré cela Otto Preminger montre toute l'injustice du fait que personne ne la croit à cause de cet aspect (elle l'a sans doute chercher) et le procès de son mari se transforme en son propre procès, ce que le personnage de James Stewart essaye d'empêcher.
On voit aussi vite que l'on est dans une période post Code Hays vu que le sujet du viol est abordé. Otto Preminger se moque aussi du côté puritain des américains dans une scène où les avocats et le juge tentent de trouver le mot le plus approprié pour designer les sous-vêtements sans choquer les gens du public. Faute de mieux, ils restent sur panties.
Joseph N. Welch, qui joue le rôle du juge Weaver, était réellement un avocat. Il est considéré comme le tombeur du sénateur Joseph McCarthy, en lui déclarant vous n'avez pas honte. Otto Preminger a dit qu'il apportait à son rôle une authenticité difficile à exprimer pour un professionnel.
Autre originalité, la musique originale du film est de Duke Ellington qui fait même un caméo pour interpréter un morceau à 4 mains avec James Stewart.
Je ne suis même pas sûre qu'aujourd'hui un studio serait capable de faire ce film tellement il est contraire à la morale hollywoodienne.
- Spoiler:
A la fin, Frederick est innocenté. Quand Paul arrive pour se faire payer, il s'est déjà enfui avec sa femme