J'ai découvert cette autobiographie de Joyce Maynard il y a deux ans lors du Festival America. Joyce Maynard était invitée avec Frédéric Beigbeder pour parler de J.D. Salinger.
Beigbeder venait de publier
Oona et Salinger et Joyce Maynard avait vécu avec Salinger alors qu'elle avait 17 ans et Salinger 53 ans.
La conversation était fort intéressante et Joyce Maynard a plusieurs fois cloué le bec à Beigbeder, ce qui me l'a rendue d'autant plus sympathique.
A la sortie j'ai acheté
Et devant moi le monde qu'elle m'a gentiment dédicacé ( à ma fille et moi en fait, car elle a écrit ce livre pour sa fille, à l'époque âgée de 17 ans, pour lui raconter son histoire et la mettre en garde.)
Le moins qu'on puisse dire c'est que la vie de Joyce Maynard est atypique et digne d'un roman. Son père était peintre et alcoolique, sa mère n'a jamais réussi à enseigner comme elle l'aurait souhaité. Elle va donc faire en sorte que l'éducation de ses deux filles soit la plus ouverte possible.
Joyce n'a qu'une envie satisfaire ses parents, qui rêvent pour leurs enfants de la célébrité qu'ils n'ont pas réussi à avoir. Aussi, très jeunes, elles apprennent à rédiger des textes, à les lire et les commenter en famille. Alors âgée de dix-sept ans, le New York Times Magazine, publie un (long) article d'elle
An 18-Year-Old looks back on life (Une fille de 18 ans se retourne sur sa vie), article qu'on retrouve à la fin du livre.
Après la publication de cet article, elle reçoit beaucoup de courrier, dont une lettre de Salinger, avec qui elle va entretenir une longue correspondance, puis elle viendra s'installer chez lui.
Joyce ne voit plus le monde que par les yeux de "Jerry". A ce moment-là, il vit presque reclus, fuyant les journalistes et le monde de l'édition et tente de formater Joyce selon ses idées. Joyce va abandonner ses études, ses goûts musicaux et adopter la vie de Jerry. Ses parents sont ravis de voir leur fille avec un écrivain si célèbre, même s'ils ont 35 ans d'écart.
Pendant la période où elle habite dans la maison de Salinger, au fond d'une route perdue de campagne, Joyce continue d'écrire pour des journaux et rédige son autobiographie (
Une adolescence américaine). Salinger ne voit pas cette célébrité d'un très bon oeil et tente de la dissuader, non pas d'écrire, mais de publier. Peu à peu les critiques envers elle se font plus dures. Joyce est terrifiée à l'idée d'avoir fait quelque chose de mal, cherche à s'améliorer, mais après une année passée ensemble, alors qu'ils sont en vacances à la mer avec ses enfants, Salinger la répudie, sans explication.
Elle est dévastée, il est méprisant et blessant. Elle mettra beaucoup de temps à oublier la vie avec Salinger et l'influence qu'il aura eu sur elle. Il faudra de nombreuses années, un mariage, trois enfants, un divorce, un déménagement, pour que Joyce se retourne sur son passé et cette période de sa vie. Elle décide alors de tout raconter. Au cours de ses recherches, Joyce apprendra, que contrairement à ce qu'elle croyait, elle n'aura été qu'une jeune fille de plus auprès de Salinger et qu'il a entretenu une correspondance avec de nombreuses autres.
Petit bonus une photo de Joyce Maynard pendant cette conversation