J'ai fini ce roman il y a quelques jours et je l'ai trouvé riche et d'une grande profondeur psychologique. Je me suis régalée.
En 1936, la société britannique considérait le divorce comme une disgrâce - et une éventualité à considérer uniquement en cas de scandale d'adultère.
Pourtant, frustrée par un mariage qui ne semble plus lui apporter ce qu'elle désire, Betty Canning y réfléchit sérieusement.
Lorsque les amis et la famille (à commencer par son intransigeante et indiscrète belle-mère) tentent d'intervenir, une séparation amère se produit, avec des conséquences désastreuses pour tous les principaux concernés.
Sur le papier, le sujet, à savoir la lente et douloureuse désintégration d'un mariage dans la classe moyenne supérieure pendant l'entre deux guerres, n'avait rien pour m'attirer particulièrement. Mais c'était bien sûr sans compter l'extraordinaire talent de romancière de Margaret
Kennedy qui a su me captiver dès les premières pages.
Le parfait dosage entre la pure efficacité romanesque du récit et sa finesse psychologique en font un roman pour le moins séduisant.
Sa construction, notamment, est brillante. Le second chapitre, qui met en scène une confrontation entre les deux belles-mères, brille par son mordant et son ironie so british. Et la séquence de longs échanges de lettres entre amis de Betty et Alec a aussi quelque chose du morceau de bravoure.
Divorce à l'anglaise est donc avant tout l'histoire d'une séparation mais ce qui intéresse peut-être avant tout la romancière ici, c'est de montrer à quel point deux personnes, par négligence l'une envers l'autre et complaisance envers elles-mêmes, se sont irrémédiablement éloignées. Et de quelle manière leur proche entourage, parfois de manière inconsciente, a participé à la chute de cette relation.
Le récit nous décrit aussi l'effet terrible que cette séparation a sur les enfants, et la façon dont, chacun, selon sa personnalité, sera impacté dans sa vie personnelle et sa vision du monde.
Avec une lucidité et une justesse saisissantes, Margaret
Kennedy nous donne à réfléchir sur la fragilité et la dimension insaisissable du bonheur. Elle traite aussi de la notion de compromis, en mettant en scène des héros et héroïnes qui apprennent peu à peu à s'adapter à de nouvelles circonstances de vie, certains avec plus de difficultés que d'autres.
Ses personnages sont loin d'être tous aimables mais ils sont formidablement incarnés et nuancés. Ils sont vrais car faillibles.
Même si son roman est bien ancré dans son époque, il garde quelque chose d'intemporel. Le regard très acéré que Margaret
Kennedy porte sur ses contemporains et les relations humaines (familiales et amoureuses) a gardé toute sa modernité. Son récit, inspiré par le nombre de divorces dont elle a été témoin dans son entourage, reste évidemment d'actualité.