The invisible woman de Claire Tomalin

J'ai terminé The Invisible woman et je sors très impressionnée de cette lecture. J'ai trouvé ce documentaire absolument passionnant. Claire Tomalin a livré plus qu'un travail de recherche et de documentation, il s'agit d'une vraie investigation ! Son ouvrage se lit presque comme une "detective story". Elle est partie sur les traces de Charles Dickens, non pas pour disséquer les moindres gestes de sa vie personnelle et amoureuse (ce qui revêtirait un petit côté voyeur et malsain, avouons le) mais pour tenter de comprendre un plus l'œuvre d'un homme fait de contradictions et révéler la personnalité d'une femme fascinante, condamnée à une vie de dissimulation et d'anonymat suite à son adultère.
Charles Dickens est montré comme un auteur au faîte de sa gloire, charismatique, à l'aura magnétique et dévoué à son public. Claire Tomalin nous dévoile là une personnalité forte, un créateur extrêmement productif mais aussi un homme passionné et vindicatif. A travers un travail intensif de journaliste et de biographe, elle a su mettre en lumière des détails d'apparence insignifiante ainsi que des évènements pour le moins significatifs pour révéler une relation amoureuse sur toute une décennie, aussi fascinante que mystérieuse.
The Invisible woman se lit presque comme un vrai roman victorien, avec son lot de mystères à déchiffrer, de frustrations amoureuses, et reposant pleinement sur le paradoxe entre passion et convention.
Nelly, même si elle garde une bonne partie de son mystère jusqu'aux dernières pages, apparaît elle aussi comme une vraie héroïne de roman victorien. En quête d'émancipation mais victime d'une société rigide et corsetée, elle a tout d'une grande figure de littérature.
A travers les pages de ce livre, Charles Dickens et Nelly Ternan sont merveillesement incarnés. L'auteur a su installer une vraie proximité entre eux et ses lecteurs. De plus, elle offre une vraie peinture sociale, en accordant bien sûr une importance toute particulière à la condition des femmes de l'époque, et aux actrices, dont Nelly, sa mère et ses deux sœurs font parti.
Et on a le plaisir de croiser de grandes figures littéraires contemporaines de Dickens, telles que Thackeray, Trollope, Elliot et bien sûr son grand amie, Wilkie Collins.
C'est captivant !

Merci pour ton avis, tu me donnes très envie de le lire!

Merci pour ton avis éclairé Emjy,   je compte bien me procurer ce livre dès que possible, j'espère qu'il n'est pas trop ardu à lire, depuis le temps que je tourne autour de la biographie que C Tomalin a écrit sur Dickens, je crois bien que je vais céder car question traduction, Dickens ne semble pas passionner l'édition française, dommage.

Je suis très sensible à ce que tu as pu écrire

Emjy a écrit:

L'auteur a su installer une vraie proximité entre eux et ses lecteurs. De plus, elle offre une vraie peinture sociale, en accordant bien sûr une importance toute particulière à la condition des femmes de l'époque, et aux actrices, dont Nelly, sa mère et ses deux sœurs font parti.

JP Ohl n'était pas très bavard dans sa bio sur les relations amoureuses de Dickens, il se concentre sur les romans et les voyages aux Amériques, cependant il évoque souvent le fait que Dickens se retire avec Nelly et sa mère à Boulogne pour fuir le tumulte de Londres et les rumeurs désagréables dont il fait l'objet, il donne quelques anecdotes sans entrer dans les détails.

Pour l'adaptation, je serai déçue de ne pas la découvrir sur grand écran c'est sur    les photos sont magnifiques surtout celle de Dickens en gros plan en plein travail d'écriture.

Je viens de terminer la lecture de Invisible woman de Claire Tomalin, et je suis encore sous la charme de cette biographie passionnante
Ses travaux de recherches sont impressionnants et permettent de lire cette biographie comme un roman victorien.

Tous les chapitres sur Nelly et sa famille amènent le lecteur à comprendre la situation des actrices de théâtre à l'époque: soit des femmes fortes, émancipées et ayant beaucoup plus de libertés que les femmes de l'époque, mais avec de nombreux inconvénients: la recherche perpétuelle de rôle à jouer, l'amalgame persistant entre actrice et prostituée, l'impossibilité de se marier en dehors du monde clos des acteurs à cause justement de la réputation des actrices etc..
Charles Dickens n'est pas montré non plus sous un côté très positif: il a fait de bonnes actions, comme aider la sœur ainé de Nelly à prendre des cours de chants en Italie et aider financièrement leurs mère et l'autre sœur Maria.
Mais le côté étouffant de sa relation avec Nelly est bien décrit: il est obligé de la cacher pour ne pas entacher son image quasi immaculée de père fantastique et d'écrivain du peuple et  il sait qu'il ne pourra jamais se marier avec elle, même si son épouse décédait.
De même, Nelly, dissimulée aux yeux de tous, ne pouvant plus exercer son métier d'actrice, devient une femme dépendante de Dickens, d'où un possible ressentiment.
Le comportement très cruel de Dickens envers son épouse sans reproche (déjà très visible dans le film) est glaçant et le rend détestable.

J'ai beaucoup apprécié que Claire Tomalin se permette de deviner certains éléments de la vie du couple (en précisant dès le début d'un chapitre qu'il s'agit de supposition de sa part) ou de se baser sur une année précise, celle du journal de Dickens qu'il a perdu aux USA et qui a été vendu après sa mort.
De même, connaitre la vie de Nelly après la mort de Dickens est passionnant. Sa vie ne s'est pas arrêtée avec la mort de l'écrivain, et qu'elle ait pu connaitre le bonheur en se mariant et avoir des enfants (malgré des difficultés financières à la fin de sa vie) fait plaisir.
Et j'adore comment Nelly, qui suit l'exemple de Dickens, ment sur sa vie comme une championne (se rajeunir de plus de 10 ans auprès de son mari, expliquer qu'elle a connu Dickens quand elle était enfant etc..)

Je suis contente de te voir aussi enthousiaste, Diana. C'est une biographie que j'avais trouvée absolument passionnante. Elle est très documentée mais se lit avec énormément de plaisir. Comme quoi, l'un n'empêche pas l'autre. 
Et je trouve que tu as tout à fait raison quand tu compares cette biographie à un roman victorien. 

Citation :

Et j'adore comment Nelly, qui suit l'exemple de Dickens, ment sur sa vie comme une championne (se rajeunir de plus de 10 ans auprès de son mari, expliquer qu'elle a connu Dickens quand elle était enfant etc..)

Nelly Ternan était indubitablement une femme de caractère ! Et j'apprécie aussi la manière avec laquelle Claire Tomalin montre à quel point elle était aussi une femme ambivalente (Nelly était progressiste sur des bien des points pendant toute sa vie mais s'est montrée sur la fin, plus conservatrice, en s'opposant au mouvement des suffragettes par exemple).

Il faudrait que je lise d'autres ouvrages de Claire Tomalin, à commencer peut-être par son autobiographie qui a reçu beaucoup d'éloges.

@Emjy
Le travail de recherche est tellement bien fait que la lecture est très fluide, il n'y a pas le côté pesant de "selon telle source, tel article etc.."
Même quand Claire Tomalin se base sur le fameux journal perdu de Charles Dickens, cela n'enlève rien au rythme de cette biographie.

J'ai surtout apprécié que Nelly n'est jamais en retrait par rapport à Dickens.
Le livre commence par sa vie de famille, sa grand-mère et sa mère artiste, et même une fois compagne illégitime de Dickens, elle reste vivante, elle voyage, rencontre ses sœurs etc..
Et ne disparait pas dans l'oubli une fois ce dernier décédé, malgré tous ses efforts

Citation :

Claire Tomalin montre à quel point elle était aussi une femme ambivalente (Nelly était progressiste sur des bien des points pendant toute sa vie mais s'est montrée sur la fin, plus conservatrice, en s'opposant au mouvement des suffragettes par exemple).

J'avoue que je ne m'attendais pas à ce qu'elle milite contre la mouvement des suffragettes
Mais elle a eu tellement de libertés par rapport aux femmes de son époque, du fait surtout de son métier, que je ne la juge pas.

Citation :

Il faudrait que je lise d'autres ouvrages de Claire Tomalin, à commencer peut-être par son autobiographie qui a reçu beaucoup d'éloges.

J'ai pour l'instant sur son autobiographie qui est très intéressante et sa biographie remarquable de Samuel Pepys.
Je te recommande les deux.

The invisible woman de Claire Tomalin nous conte la vie de Ellen "Nelly" Ternan, la femme qui a fait tourner le coeur de Charles Dickens pendant 13 ans tout en restant invisible. Et c'est bien cet aspect qui est absolument fascinant : comment Dickens a réussi à la cacher mais aussi comment ses proches ont participé à l'un des secrets les (presque) mieux gardés au monde et comment Nelly elle-même a tout fait pour que ce soit oublié (jusqu'à se donner 12 ans de moins pour rayer toutes ces années de sa vie !).

Le livre est divisé en 3 parties. La première évoque la famille de Nelly et décrit le théâtre à l'époque victorienne avec ses grandes stars mais aussi les petits circuits dans le nord de l'Angleterre qui correspondent plus à ceux de la famille de Nelly dont aucun membre n'est devenu une grande star de l'époque. Comme c'est l'une de mes marottes, j'ai trouvé cela absolument passionnant.

La deuxième partie se concentre sur les 13 ans de sa relation avec Dickens. Il y a un moment où elle disparaît pendant 4 ans des sources. Elle vit peut etre en France, elle a peut être eu un enfant. Claire Tomalin nous présente les hypothèses qui ne resteront jamais que des hypothèses. Elle réapparaît au moment de l'accident de Staplehurst puis jusque la fin de la vie de Dickens.

La 3e partie correspond à l'après-Dickens est au fait que Nelly s'est complètement réinventée en gardant le secret sur son passé. Sa vie n'a toutefois pas été joyeuse. On voit aussi comment la famille Dickens contrôle l'image de l'un des auteurs préférés des anglais. L'un des moments les plus touchants est celui où le fils de Nelly découvre la vérité et surtout que sa mère lui a menti toute sa vie. Le pauvre semble ne s'être jamais remis de ce choc (je pense que c'est plus cela plutôt que d'avoir appris qu'elle était la maîtresse de Dickens).

Ajoutez à cela des personnages secondaires fort intéressants comme la soeur aînée de Nelly qui va devenir l'épouse de Thomas Trollope (le frère aîné d'Anthony) et à qui l'on osera jamais non plus évoquer son passé d'actrice. Ou bien son autre soeur Maria qui semblait la plus ennuyeuse pour finir artiste et journaliste et voyager en Afrique.

Je ne sais vraiment pas quoi penser de Georgina Hogarth. D'un côté, elle me fait pitié parce que j'ai vraiment l'impression qu'elle était amoureuse de Dickens (sinon je ne vois pas comment expliquer son attitude) et qu'elle en aura souffert toute sa vie, et d'un autre, je la trouve glaçante dans son contrôle de tout et tout le monde, dans son rejet de sa propre famille. Vraiment, un des personnages les plus ambivalents de l'histoire !

Bref, j'ai trouvé cette lecture absolument passionnante de bout en bout. Je vais clairement poursuivre ma découverte des ouvrages de Claire Tomalin.

Shelbylee a écrit:

Bref, j'ai trouvé cette lecture absolument passionnante de bout en bout. Je vais clairement poursuivre ma découverte des ouvrages de Claire Tomalin.

Excellente idée

Ravie de te voir aussi enthousiaste, Shelbylee  
C'est vrai que cette biographie est fascinante, j'ai beaucoup aimé le point de vue adopté par Claire Tomalin qui met vraiment bien en valeur l'ambivalence et la complexité de la "figure" d'Ellen Ternan.

Citation :

Je ne sais vraiment pas quoi penser de Georgina Hogarth. D'un côté, elle me fait pitié parce que j'ai vraiment l'impression qu'elle était amoureuse de Dickens (sinon je ne vois pas comment expliquer son attitude) et qu'elle en aura souffert toute sa vie, et d'un autre, je la trouve glaçante dans son contrôle de tout et tout le monde, dans son rejet de sa propre famille. Vraiment, un des personnages les plus ambivalents de l'histoire !

C'est ce que je m'étais dit aussi. Je me demande s'il existe une biographie ou un essai sur les femmes dans la vie de Charles Dickens parce qu'entre son épouse, Nelly, ses belles sœurs, il y en aurait des choses à écrire !

Citation :

Bref, j'ai trouvé cette lecture absolument passionnante de bout en bout. Je vais clairement poursuivre ma découverte des ouvrages de Claire Tomalin.

Quelle sera ta prochaine lecture ? Moi je suis très tentée par son autobio et par la biographie de Thomas Hardy.

Alors, j'ai déjà son Dickens même si je ne suis pas sûre de le lire maintenant.

Après, je n'ai toujours pas lu celle de Jane (et je ne l'ai pas), celle d'Hardy me tente aussi beaucoup surtout qu'elle en parle un tout petit peu comme un homme qui réécrit aussi son histoire. Et puis, il y a celle de Mrs Jordan vu que c'est une actrice. Mais même les autres me tentent !

Je vais regarder pour Dickens et ses femmes. Rien ne m'a sauté aux yeux pour l'instant, mais je n'ai pas trop regardé non plus, parce que j'avais déjà beaucoup de choses non lues dans ma PAL.

Alors j'ai vérifié sur electre et seulement 3 de ses biographies ont été traduites en français : celle de Katherine Mansfield, celle de Jane Austen et celle de Samuel Pepys. Seule la dernière semble toujours être éditée. Une honte.
Sinon, elle a écrit des préfaces et postfaces d'ouvrages pour le moins intéressants. J'en parlerai ailleurs sur le forum.

Sinon, pour en revenir à Nelly, il y a un aspect de sa vie qui m'avait frappée (et au sujet duquel j'avais lu un article il y a des années sur le net) : son rejet complet du mouvement des suffragettes. Sur ce point, elle était restée victorienne jusqu'au bout des ongles.

Emjy a écrit:

Sinon, pour en revenir à Nelly, il y a un aspect de sa vie qui m'avait frappée (et au sujet duquel j'avais lu un article il y a des années sur le net) : son rejet complet du mouvement des suffragettes. Sur ce point, elle était restée victorienne jusqu'au bout des ongles.

J'ai trouvé cela aussi très surprenant de la part de Nelly.
Mais comme elle avait beaucoup plus de libertés que les femmes de l'époque, peut être n'en a-t-elle pas vu l'utilité/l'importance?

Je pense aussi qu'elle n'était peut être pas si "moderne" que cela.

Elle n'a pas réussi à dépasser son statut de compagne de Dickens, même si c'était évidemment compliqué, mais comme Claire Tomalin le dit George Eliot et Lewes sont reçus chez les Trollope et présentés aux gens quand bien même ils sont un couple libre parce que justement ils le revendiquent.

Après, je ne la juge pas, sa place était assez compliquée, Dickens n'est pas Lewes au niveau de la notoriété, mais c'est juste que ça ne me semble pas illogique avec le reste de sa personnalité.

D'ailleurs, ce qui me fascine c'est qu'on en ressort sans vraiment savoir qu'elle était sa position par rapport à sa relation. Un peu d'opportunisme, un peu une offre qu'on ne peut pas refuser ? Est-ce qu'elle en a eu vraiment honte ?
Je préfère penser qu'elle a fait partie des gardiennes du secret de Dickens mais au final, on ne saura jamais.

Shelbylee a écrit:

D'ailleurs, ce qui me fascine c'est qu'on en ressort sans vraiment savoir qu'elle était sa position par rapport à sa relation. Un peu d'opportunisme, un peu une offre qu'on ne peut pas refuser ? Est-ce qu'elle en a eu vraiment honte ?
Je préfère penser qu'elle a fait partie des gardiennes du secret de Dickens mais au final, on ne saura jamais.

Je suis d'accord avec toi, elle a préféré rester dans l'ombre et finalement on ne sait pas ce qu'elle pensait ni comment elle a vécu cette période de sa vie avec Dickens.