Même lorsqu'il faisait partie de l'avant-garde du cinéma expressionniste en Allemagne,
FRITZ LANG réalisait déjà, d'une certaine manière, des "films noirs".
Il se sent dès lors comme un poisson dans l'eau avec le
film noir hollywoodien.
Il réussit à se glisser dans le genre en y imprimant sa patte d'auteur ainsi que son univers si dense.
On y retrouve tout ce qu'il affectionnait dans sa période muette : poursuites et chasse à l'homme; écrans, vitrines et miroirs; jeux de piste; serial killers; ombres, lumières et ténèbres; souterrains, tunnels et puits; violence des pulsions; regard, surveillance et paranoïa, le thème du double, etc.
Sous ses airs sérieux, Fritz Lang aime le feuilleton, les aventures exotiques, les péripéties à la Tintin, les
rebondissements, les indices, le jeu de piste, les sociétés secrètes, les rituels... Il a sa place entre Eugène Sue et Hergé.
Au reste, j'ajouterais que, même lorsqu'il tourne un western (
Rancho notorious), un film d'espionnage ou de propagande anti-nazi(
Cape et Poignard, Les Bourreaux meurent aussi), un film d'aventures (
Moonfleet), ou une "chronique de la vie américaine
" (Le Démon s'éveille la nuit) , Fritz Lang ne peut s'empêcher de faire du "film noir" !
J'attire , ici, votre attention sur trois films américains de Fritz Lang.
Moins célèbres que Les
Contrebandiers de Moonfleet , que
Les Bourreaux meurent aussi, que
Fury ou
J'ai le droit de vivre (tous d'absolus chefs-d'oeuvre et des classiques), ces trois-là n' ont pas moins leur place en tête du peloton de ses oeuvres américaines.
Tous les trois sont des diamants... noirs.
MANHUNT (Chasse à l'Homme, 1941)
avec
Walter Pidgeon et
Joan Bennett (qui jouera dans 4 films de Lang)
Thriller de poursuite, de chasseur et son gibier, film anti-nazi,
MANHUNT ouvre avec un des plus sensationnels débuts de l'Histoire du cinéma. Essayez de ne rien en savoir, ce serait dommage.
Le duel final, avec
George Sanders, n' est rien moins que magnifique !
THE BIG HEAT (Règlement de comptes, 1953)
Déguisé en série B, c'est un des très grands films américains de Fritz Lang. Et, à mon avis, un des meilleurs films noirs du Cinéma tout court. Je le place, dans mon panthéon personnel, au même rang qu'un
Laura ou qu'un
Gun Crazy.
(*)Glenn Ford, Gloria Grahame, Lee Marvin, Jocelyn Brando : la distribution est magistrale et l'épure de la mise en scène constante.
Parmi leurs meilleurs rôles pour
Gloria Grahame et pour
Glenn Ford. La gestuelle de Glenn Ford y est, comme toujours, très élégante. Il monte un escalier, porte le pardessus et le chagrin comme personne...
WHILE THE CITY SLEEPS (Le 5ème victime, 1956)
Le plus clairement affiché "pulp fiction", le plus
série B de ce trio. Petit thriller formidable sur fond de rivalités dans le milieu de la presse.
Un digest de tous les thèmes chers à Fritz Lang. Avec, en prime et en
serial Lipstick Killer, le jeune John Drew Barrymore (de la fameuse dynastie) avant qu'il ne devienne à son tour le papa de Drew.
Dans ce film, la distribution à elle seule vaut le déplacement :
Ida Lupino, Vincent Price, George Sanders, Dana Andrews, la sculpturale Rhonda Fleming, Thomas Mitchell...
Edit: (*) Gosh...! Voilà-t-y pas que j'oublie
Le Grand Chantage(Sweet smell of success) d'Alexander Mackendrick, l'autre "Film Noâr" culte de mon Top 3 !!!