Legende - chez 10/18.Un livre atypique dans sa forme et dans sa réflexion.
Il s’agit d’un groupe d’amis, amoureux de la littérature, qui ont pour habitude de se réunir le soir et de parler de leur passion. Le noyau dur est une critique très connue, célibataire de 45 ans : Anita. Les autres écrivent plus ou moins aussi et on attend la plus talentueuse : la célèbre Madala Grey.
Qui ne viendra pas car on va apprendre son décès. Elle vient de mourir en couches. Cette absente sera pourtant l’héroïne de cette causerie nocturne hallucinante où chacun évoque déjà sa postérité, son talent et ses secrets.
Sans trop déflorer l’originalité du sujet, disons que le dialogue va vite tourner à l’éreintement sournois et jaloux, à la réécriture de la vie de la défunte, de ses éventuelles idylles amoureuses cachées, montrant ainsi l’aigreur envieuse des intervenants, particulièrement d’Anita que la stérilité créative a rendue amère.
Ici, on retrouve l’habituelle rouerie des romancières anglaises, délicieuses quand il s’agit de mordre en souriant. C’est donc assez pervers mais très riche sur le fond. Car on parle de création, du rapport entre l’imaginaire et le réalisme, du prosaïsme dans la vie de l’écrivain (Madala s’est mariée et en est devenue médiocre dans son art, du moins, c’est ce qu’ils disent, etc…).
C’est bien le « mythe » de l’écrivain qui est en jeu. Madala est un parangon au centre des questionnements. Son intériorité, ses impulsions d’auteur, ses inventions… Bref, on théorise à l'envi.
Le tout se fait sous forme de dialogues, de descriptions légères mais qui suffisent à dessiner le vrai profil de Madala que visiblement seul le lecteur appréhende correctement.
Ses « amis » s’égarent en conjectures et en fiel sur sa vie intime, son génie réel ou surfait, etc…
C’est ADMIRABLE d’intelligence et à la fin, très émouvant. On découvre toute la grandeur de Madala, dans sa simplicité rayonnante, mais je n’en dis pas plus.
Ce livre ne peut que ravir les passionnés de lettres.
Hélas trop peu connu.
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