Growing Up d'Angela Thirkell

Pendant la seconde guerre mondiale, Sir Harry et son épouse Lady Waring transforment leur demeure en hôpital de convalescence pour soldats. En même temps, ils y hébergent leur nièce, Leslie, ainsi que le capitaine Noel Merton et sa femme Lydia. Très vite, tout ce petit monde (et ce, y compris les domestiques) apprennent à se connaître et des liens commencent à se tisser. Mais en toile de fond de cette innocente comédie de mœurs, la guerre et ses ravages ne se font pas oublier : entre l'attente anxieuse de nouvelles des frères, amis ou fils à l'armée, les soldats blessés (certains gravement), et l'effort de guerre auquel tout le monde prend part, les personnages traversent bien des peines et des embûches.

Comme ce tome dans la série des Barsetshire se passe pendant la guerre, il a un goût légèrement différent de ceux que j’ai déjà lus jusque-là : c’est un peu la fin de l’insouciance qui domine tellement les autres romans d’Angela Thirkell. Et elle souligne doublement ce changement, non seulement en plaçant son intrigue pendant la guerre, mais aussi en reprenant quelques personnages rencontrés dans les précédents opus tandis qu’ils étaient jeunes et frivoles (Tony Morland, Lydia et Noel, à présent mariés, Philip Winter etc.), et comme le titre l’indique, ceux-ci ont maintenant bien grandi. Non seulement la guerre, mais aussi leurs vies d’adultes, imposent sur eux des responsabilités auxquelles ils doivent encore se familiariser. Et bien que tous ces personnages aient clairement évolué, ils naviguent encore des eaux instables et inconnues, car le thème qui semble parcourir le roman comme fil conducteur, c’est cette incertitude, ce sentiment de jouer à l’adulte sans vraiment en être un. Et comme le dit Philip à un moment, personne ne se sent jamais réellement "adulte".

Et c’est justement au travers de ces questionnements et de ces doutes, qu’Angela Thirkell parvient à conserver un ton qui manque juste un peu de sérieux, et qui communique chez le lecteur l’empathie qu’on retrouve toujours dans ses romans. Les temps sont graves, mais l’intonation de ce roman ne l’est pas. Les personnages sont attendrissants, maladroits parfois, et la voix narrative, qui englobe leurs pensées intérieures avec un humour bienveillant, les livre non pas au jugement, mais à la compassion du lecteur.

Et ce sont essentiellement les personnages qui forment le noyau du roman, et non l’intrigue, qui est plutôt sommaire, sans réelles surprises et assez peu élaborée. Angela Thirkell ne semble pas chercher à mener les événements dans une certaine direction, mais plutôt à illustrer la vie rurale en Angleterre pendant la guerre et la réalité qu’elle représente pour ses personnages qui ont connu des temps bien différents. C’est donc plus une succession de scènes qu’elle nous livre, plutôt qu’une narration progressive, ce qui donne à ce livre un air un peu statique. Ce qui reflète en fait très bien son propos : des vies mises en pause, une phase particulière où tout semble être à l'arrêt.

C’est un roman tout en douceur, un peu moins sucré que les autres de la série, mais loin d’être terne pour autant

Merci pour cette présentation fort alléchante. Je lis la série des Barsetshire dans l'ordre, je ne suis donc pas tout à fait prête à lire ce titre-ci mais j'ai hâte

Personnellement je ne fais pas attention du tout à les lire dans l'ordre... Je prends plus chaque titre comme un roman individuel, avec quelques références aux autres de temps en temps, mais je ne ressens pas nécessairement le besoin de les suivre de façon chronologique. Mais pour celui-ci, je suis quand même contente d'avoir lu notamment Summer Half avant, qui établit les personnages principaux dans leur jeunesse. Mais l'inverse peut être chouette aussi : lire celui-ci, et puis plus tard découvrir comment ils étaient quand ils étaient plus jeunes Sauf que du coup, on sait déjà qui finira par se marier avec qui, mais ça ne me dérange pas puisque de toute façon, on s'en doute souvent depuis le début, on ne peut pas dire que ce sont vraiment des intrigues pleines de suspens. Cette série est plus un tissus de connections qu'une véritable chronologie, dans mon optique en tout cas

Tu en es où du coup ?

LilyBart a écrit:

Tu en es où du coup ?

Le dernier que j'ai lu est August Folly, donc il m'en reste un certain nombre

Oui, je sais bien qu'ils peuvent se lire dans le désordre mais comme je les lis avec une amie, je préfère suivre l'ordre chronologique. Et puis, même si les histoires peuvent s'apprécier indépendamment, j'aime bien les petits clins d'oeil que la romancière adresse à ses lecteurs. Il existe d'ailleurs un site bien pratique qui répertorie les liens entre les différents personnages.