Toni Morrison - "Home", "Beloved" et autres romans

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Résumé :


Vers 1870, aux États-Unis, près de Cincinnati dans l'Ohio, le petit bourg de Bluestone Road, dresse ses fébriles demeures. L'histoire des lieux se lie au fleuve qui marquait jadis pour les esclaves en fuite la frontière où commençait la liberté. Dans l'une des maisons, quelques phénomènes étranges bouleversent la tranquillité locale : les meublent volent et les miroirs se brisent, tandis que des biscuits secs écrasés s'alignent contre une porte, des gâteaux sortent du four avec l'empreinte inquiétante d'une petite main de bébé. Sethe, la maîtresse de maison est une ancienne esclave. Dix-huit ans auparavant, dans un acte de violence et d'amour maternel, elle a égorgé son enfant pour lui épargner d'être asservi. Depuis, Sethe et ses autres enfants n'ont jamais cessé d'être hantés par la petite fille. L'arrivée d'une inconnue, Beloved, va donner à cette mère hors-la-loi, rongée par le spectre d'un infanticide tragique, l'occasion d'exorciser son passé.
Inspirée par une histoire vraie, renforcée par ses résonances de tragédie grecque, cette oeuvre au lyrisme flamboyant est l'histoire d'un destin personnel et d'un passé collectif. Hymne à l'amour et à la maternité, roman de la faute, de la difficulté du pardon comme du deuil, de la rédemption par l'oubli, Beloved fut récompensé par le prix Pulitzer en 1988.

J'ai adoré ce livre et c'est pour cela que je viens vous en parler d'ailleurs


C'est le seul livre que j'ai lu qui a été capable de me chambouler autant. C'est une histoire horrible et magnifique à la fois, celle d'une mère esclave qui préfère tenter de tuer tous ses enfants plutôt que de les voir réduit à un état de bête, un état d'esclave.
J'ai aimé la façon que l'auteur a de narrer cette histoire, d'une manière si subtile, si sensible et avec tellement de finesse que même l'insoutenable peut être narrer.
C'est un magnifique livre qui m'a fait beaucoup réfléchir : d'une part, sur l'esclavage dont j'avais des connaissances plus que succinctes et sur l'histoire des Etats-Unis et d'une autre part, sur ce qu'est la condition d'Homme.


Bref pour moi, c'est un livre indispensable à lire de part sa beauté et son humanité.

Il me semble que j'ai déjà eu ce livre en main, du moins sa couverture me dit quelque chose

En tous cas le résumé et ton avis le rendent très intéressant. Je prends note

J'ai très envie de lire ce livre, et d'autant plus après ton excellente critique !

Merci

J'ai lu ce livre à l'époque du lycée, c'est ma maman qui me l'avait prêté et j'avais été très troublée par cette histoire si forte. Je ne me souviens plus de tous les détails mais je me rappelle bien de toute la dimension fantastique qui m'avait fait frissonner! Ta présentation me donne envie de le relire.

J'ai étudié Sula au lycée, et j'ai récemment lu Un Don. Les deux m'ont plu, ainsi, ce fait combiné à ta critique, me donne envie de lire Beloved, ce que je vais faire quand j'aurai le temps.

En ce moment je lis Paradis de la même romancière. C'est complexe, mais très intéressant.

Le livre s'ouvre sur une scène très mystérieuse. Des hommes viennent de tuer une femme blanche, et en poursuivent d'autres. Petit à petit on comprend qu'ils se trouvent dans un ancien couvent et qu'ils sont venus pour se débarrasser de personnes qui mettent en danger le bien-être de leur ville habitée uniquement par des Noirs. On ne sait pas s'ils vont tuer les autres femmes.

Chaque chapitre est ensuite consacré à un personnage féminin et par le biais de nombreux retours-en-arrière (la construction est extrêmement complexe) on découvre l'histoire de Ruby, une ville fondée par des anciens esclaves pour fuir le racisme des Blancs. Ils y vivent selon des préceptes très strictes : Aucun cinéma, aucun restaurant et aucun hôtel (pour ne pas attirer les gens), pas de musique moderne, pas d'alcool. Les jeunes générations vont chambouler ce petit monde clôt, et des femmes de l'extérieur vont le mettre en danger.

J'avance petit à petit mais c'est très prenant, et le livre pousse à réfléchir.

J'ouvre rapidement un topic à un roman que je compte lire bientôt, il s'agit du nouveau et très attendu Toni Morrison. Les critiques sont très bonnes, on parle d'un roman court mais terriblement grâcieux ...

Citation :

L’histoire se déroule dans l’Amérique des années 1950, encore frappée par la ségrégation. Dans une Amérique où le « White only » ne s’applique pas qu’aux restaurants ou aux toilettes, mais à la musique, au cinéma, à la culture populaire. L’Amérique de Home est au bord de l’implosion et bouillonne, mais c’est ici la violence contre les Noirs américains, contre les femmes qui s’exprime. Les grands changements amorcés par le rejet du Maccarthisme, par la Fureur de vivre ou le déhanché d’Elvis n’ont pas encore commencés. En effet, les Noirs Américains sont brimés et subissent chaque jour le racisme et la violence institutionnalisés par les lois Jim Crow, qui distinguent les citoyens selon leur appartenance « raciale ». Pour eux, le moindre déplacement, même le plus simple, d’un état à l’autre, devient une véritable mission impossible. En réponse à cette oppression, l’entraide et le partage – facilités par l’utilisation du Negro Motorist Green Book de Victor H. Green qui répertorie les restaurants et hôtels accueillant les noirs dans différents états – sont au coeur des relations de cette communauté noire dans une Amérique à la veille de la lutte pour les droits civiques.

Et vous, êtes vous tentés ?

J'ai très envie de le lire également, les avis sont bons en effet.

Une nouvelle romancière à découvrir. J'ai hâte de lire ton avis et les autres, bien sur ...

Je suis très tentée aussi. J'aime beaucoup les œuvres de Toni Morrison. Je note le titre de ce dernier ouvrage dans ma LAL !

Ca fait un moment que j'ai lu Beloved mais je me souviens parfaitement de mon ressenti. Il dépeint des actes durs qui m'ont faits frissonner. C'est un roman poignant, on ne peut pas être insensible au sort de l'héroïne et de son petit entourage. J'ai beaucoup aimé la relation qui lit Beloved et l'héroïne. Cette touche de fantastique créée une atmosphère inquiétante.

Home est un texte court et puissant, c'est le genre de texte minimaliste à lectures multiples, la scène d'ouverture est cruciale et n'est vraiment compréhensible qu'à la fin du roman, les personnages ne m'ont pas passionné, ils restent assez impersonnels, et ce n'est peut être pas le but d'être en empathie avec eux, d'ailleurs je l'ai un peu vécu sous cet angle, sauf qu'entre les lignes en demi teinte c'est l'histoire de tant de personnes qui ont subi la violence d'une époque, de jeunes qui s'engagent dans l'armée et n'obtiennent aucune reconnaissance, de gens qui aiment leur pays, leur terre et que l'on chasse, de gens que l'on utilise comme des objets.

La violence est présente, et là aussi Toni Morrisson sait user de l'écriture pour marquer les esprits, c'est vraiment un bon texte, un vrai plaisir à lire en quelques heures presque d'une traite. Deux passages m'ont vraiment noué la gorge, l'un par sa violence, l'autre par sa beauté. C'est aussi une belle histoire entre un frère et une soeur, Franck et Cee, une lecture vive pour l'esprit.

Ton avis donne envie Constance!

Home est le premier roman de Toni Morrison que je lis et je pense que je vais poursuivre ma découverte de cet auteur car il m'a bien plu.

J'ai surtout aimé les thèmes évoqués par l'auteur et sa manière de les aborder : le racisme et la ségrégation bien sûr, mais aussi les traumatismes post-guerre, la honte, la difficulté à se reconstruire... D'autre part, même si les héros n'ont pas été très gâtés par la vie (et ne le sont toujours pas), le style de Toni Morrison rend cette histoire tout de même belle. On ne sent jamais mal à l'aise ou déprimé à la lecture, même si certains passages sont assez dur.
Je regrette juste le choix narratif fait par l'auteur, car j'ai été parfois un peu perdue à la lecture : je ne savais pas trop qui parlait, à quel comment on se trouvait...

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Je regrette juste le choix narratif fait par l'auteur, car j'ai été parfois un peu perdue à la lecture : je ne savais pas trop qui parlait, à quel comment on se trouvait...

Moi ca ne m'a pas plus génée que cela, car Franck est un personnage en errance et le texte suit son cheminement, le texte ne semble pas être structuré mais c'est loin d'être le cas, j'en ai relu quelques passages ce week end.
Moi j'aime beaucoup car cela permet d'avoir plusieurs interprétations selon le lecteur, par moment il y a des flaskbacks entre passé et présent et les chapitres en italique sont énigmatiques, ils traduisent l'intériorité de Franck je me suis posée beaucoup de questions sur Franck, sur sa nature profonde, bonne mauvaise et puis j'ai dépassé un peu ce raisonnement trop simpliste???

Le tout premier chapitre est lui aussi bizarre, je n'ai rien compris.
Il faut vraiment aller juqu'au bout du roman pour comprendre ce 1er chapitre, voire même je l'ai relu pour bien "boucler ma lecture, c'est la première fois que cela m'arrive de cloturer ma lecture en reprenant le début du roman.

Je voulais me prendre ce livre, mais 16 euros pour un livre aussi petit..
Je n'avais pas non plus accroché avec " BELOVED" .. qui est le livre le plus stupide que j'ai pu lire :face:

Maybe plus tard je donnerai une chance à ce roman, quand je le trouverais pour une somme plus abordable sur amazon.

MissFairlie a écrit:

Je n'avais pas non plus accroché avec " BELOVED" .. qui est le livre le plus stupide que j'ai pu lire :face:

Pourquoi stupide ?

C'est vrai que l'écriture de Toni Morisson est à part, de temps à autre le style n'est pas compréhensible, on se demande ce qu'elle a voulu dire et puis c'est aussi le propre d'un écrivain d'aller chercher le lecteur, ce n'est pas du tout cuit, du littéral, ce n'est pas lire et voir le film se dérouler sous nos yeux, il faut accepter d'avoir le poil qui se hérisse, d'avoir la gorge nouée ou tout simplement de verser une larme, c'est un peu le travail de l'écrivain de susciter toutes ses émotions. Elle évoque des situations de personnes, qu'il ne serait pas possible, souhaitable à tout le monde de vivre, elle en parle sans détours, elle sait aussi que ce qu'elle écrit est un peu vrai, elle sait de quoi elle parle!

Lorsque j'ai terminé il m'arrive parfois d'écrire sur un carnet mes impressions plus personnels que sur internet avec Toni Morrisson j'ai écrit 4,5 pages sur Home ce qui est rare à part Tolstoi je n'ai jamais eu l'occasion d'écrire autant!

Et puis, je ne crois pas qu'il soit pertinent de mesurer le rapport qualité/prix d'un livre à son nombre de pages, et puis ce livre est à relire c'est clair.

Merci Constance pour ton avis.

Toni Morrison est un auteur qui demande beaucoup à son lecteur. Je me souviens de passages complexes de Paradis ou Love. Il faut vraiment s'accrocher. Home me donne envie parce que la période de la ségrégation m'intéresse beaucoup.

Je suis aussi très surpris de voir qu'on puisse qualifier Beloved de stupide.

Damien a écrit:

Je suis aussi très surpris de voir qu'on puisse qualifier Beloved de stupide.

Moi aussi. Peut-être peux-tu développer ta critique MissFairlie ?

Et bien, j'ai trouvé ca complétement idiot cette histoire de fantome!
"Beloved" est un fantome et elle rentre dans la maison de sa mère, comme ca? ils ne s'apercoivent jamais que c'est un fantome.
Puis tous ces hommes qui s'appellent Paul,je n'ai pas compris..
Il y a sans arret des flashbacks et on perd le fil de "l'histoire" si jamais il y en a vraiment une..

Tu as eu du mal à accrocher, ou même à trouver l'intérêt du récit. De là à dire que c'est idiot ou stupide, je trouve ça un peu extrême. Je n'aime pas Proust, et j'ai du mal à le lire, je ne qualifierais pas pour autant ses romans de stupides.

L'idée du fantôme est surtout symbolique. Et d'ailleurs on ne sait pas s'il s'agit d'un revenant ou d'une folle.

Si on ne sait pas si c'est une folle ou un fantome, c'est encore plus incohérent je trouve.
Bref ce n'est pas un livre que j'ai apprécié de lire , c'est sûr

Ce n'est pas incohérent, c'est ambigu. C'est le principe même du fantastique du XIXe siècle (que reprend le roman). Le lecteur hésite entre une explication rationnelle ou surnaturelle. Certains lecteurs peuvent le ressentir comme un choix frustrant (qui n'a pas hurlé à la fin du Tour d'écrou ?), mais c'est un choix délibéré. Une manière d'évoquer la complexité de la perception.

Le fantôme a une signification symbolique, ce sont les erreurs du passé qui reviennent hanter l'héroïne. Le roman raconte une histoire troublante et pousse à la réflexion : Qu'est-ce que la liberté ? Jusqu'où pourrions nous aller pour défendre nos enfants ?

Je reconnais que la lecture n'est pas facile. Toni Morrison fait des choix narratifs complexes. Ce n'est pas forcément du goût de tout le monde. Mais son écriture est loin d'être incohérente. Ce n'est pas comparable à un écrivain débutant qui aurait raconté une histoire invraisemblable, une intrigue qui ne tient pas debout. Dans le mot incohérent, on a l'impression qu'elle a raté quelque chose, qu'elle est brouillon. Pour moi Toni Morrison réfléchit beaucoup à son style et à la narration.

J'ai lu Home il y a quelques jours et voici mon avis

Chaque nouvelle parution de Toni Morrison fait figure de véritable évènement sur la scène littéraire internationale et Home ne fait pas exception ! Elle est l'un des écrivains les plus fascinants de sa génération. Comme tous les grands auteurs, elle a une voix propre et reconnaissable entre toutes. Maintenant âgée de 81 ans, on remarque à quel point, à travers ce roman tout particulièrement, son talent s'est affiné. La forme brève est désormais celle qui lui sied le mieux. A travers à peines quelques pages, le décor est planté, la psychologie des personnages dessinée et les enjeux dramatiques mis en place. L'économie de moyen dont elle fait preuve ici sert merveilleusement bien son propos, son style n'a jamais été aussi tranchant et poétique. Dans ce court récit sur fond de parcours initiatique et de retour aux origines, et à la maison (dont le titre, sobrement choisi, Home ), Toni Morrison brasse des thèmes chers à son coeur de femme de lettres et engagée : l'enfance, le souvenir, la honte, la souffrance et plus que tout encore, la rédemption. On est dans les années 50, au lendemain de la guerre de Corée, c'est le moment pour Frank de panser ses plaies et de faire face au choc post-traumatique. Mais il ne lui suffit pas d'avoir assisté à d'innommables horreurs en Corée, il doit aussi reprendre pied dans une Amérique où la segrégation raciale est plus forte que jamais et où les populations noires sont encore pourchassées par le Ku Klux Klan.
Ce roman marque par la subtilité et la profondeur de son propos et s'apparente pour moi à une petite musique feutrée qui laisse entrevoir une grâce authentique, mais terrible.