Ce roman a fait beaucoup parler de lui outre-Manche. Et pour cause, il a reçu le Prix Costa, l'équivalent anglais de notre Prix Renaudot et a été nominé au Orange Prize.
Dans une petite ville du Surrey, au sud de Londres, pendant les années 50, tout le monde va à l'église, joue au tennis et fête Noël dans l'insouciance et l'alcool ; les jobs s'obtiennent au cours de conversations de quelques minutes au coin du feu, et les jardiniers sont aux petits soins pour les massifs de fleurs des riches demeures victoriennes. Mais cette façade hypocrite et fragile se fissure à partir du jour où le petit Lewis Aldridge, âgé d'une dizaine d'années, assiste, impuissant et terrifié, à la noyade de sa maman adorée, libre d'esprit et anticonformiste. Privé du réconfort d'un père à peine revenu de la guerre, homme froid, autoritaire et accablé par le veuvage, Lewis se rétracte dans la douleur et sombre peu à peu dans le doute, la solitude, l'automutilation, puis la délinquance... En 1957, quand il sort de prison où il vient de passer deux ans pour avoir incendié l'église de Waterford, il n'a que dix-neuf ans... Son retour chez son père, remarié et peu pressé de revoir son fils, fera non seulement exploser sa famille, mais une communauté tout entière...
J'ai lu ce roman en deux jours à peine. J'ai appris que l'auteur, Sadie
Jones, avait écrit
The Outcast d'abord comme un scénario, ce qui ne me surprend pas. Elle sait très bien dresser un décor, mettre en forme les différentes étapes de l'intrigue, donner vie à des personnages plus vrais que nature et surtout, créer une ambiance. Son roman se prête donc extrêmement bien à une adaptation.
The Outcast est un roman très sombre. C'est l'histoire d'un petit garçon puis d'un jeune homme qui s'auto-détruit, s'abandonne à ses pires instincts et se coupe des autres. Il ressent le besoin de s'entraîner dans les ténèbres.
Le roman nous décrit son abandon et son désir de transgression. Le lecteur assiste, impuissant, à la plongée en enfer d'un jeune garçon traumatisé par la perte brutale et tragique de sa mère.
Lewis est un personnage explosif, qui bouleverse les moeurs de la petite société étriquée qui ne le comprend pas et le rejette. Il grandit dans l'indifférence générale, auprès d'un père trop froid pour exprimer ses sentiments et une belle-mère jeune, idéaliste et complètement dépassée par la situation. Sa mère, Elizabeth, passionnée et rebelle, lui manque terriblement mais il n'a presque aucun souvenir d'elle.
Et puis, il y a la famille Carmichael qui habité à côté et dont le père, autoritaire et ultra-conformiste, lui mène la vie dure. Mais heureusement, il y aussi l'émouvante Kit, la fille cadette (peut-être mon personnage préféré du roman
) à qui les blessures émotionnelles de Lewis ne semblent pas si incongrues ...
Chacun se doit de fuir ce jeune homme mutique et étrange. Derrière les façades lisses, le chic des réceptions et dîners, les bonnes manières bourgeoises, se cachent de lourds secrets de famille et une colère qui gronde et ne demande qu'à se révéler.
The Outcast est un roman bouleversant de noirceur mais que je n'ai jamais trouvé oppressant. On sent bien sûr le drame, le poids du remords, du veuvage et du deuil mais aussi le besoin de rédemption malgré les plaies difficiles à cicatriser. C'est un livre fort psychologiquement.
J'ai lu de ci delà qu'on avait comparé ce roman à
Expiation d'Ian McEwan et je ne comprends pas bien pourquoi ! Il s'agit certes là aussi de drame familial et de démons intérieurs mais le roman de McEwan m'a semblée bien plus vertigineux...
The Outcast se place plus à mon sens dans la veine du roman réaliste. Il y a du romanesque certes mais le récit reste sensible et juste. J'ai beaucoup aimé.
Pour information, le roman vient de sortir en poche chez 10/18 (j'aime beaucoup la couverture, que je trouve extrêmement bien choisie) :
Une adaptation au cinéma est prévue ...