Eve sur la balançoire - Conte cruel de Manhattan de Nathalie Ferlut

Eve sur la balançoire - Conte cruel de Manhattan est un roman graphique sorti il y a quelques jours chez Casterman. J'ai été immédiatement tentée par cet ouvrage après en avoir feuilleté quelques pages. Les traits délicats du dessin et le jeu sur les couleurs m'ont tout de suite séduite. Le style graphique est élégant, fin et empreint de douceur, pour une histoire qui, elle, est loin de l'être ...


Cet ouvrage documenté et ambitieux évoque la vie d'Evelyn Nesbit dite Eve. Première pin-up américaine, icône érotique surnommée "la fille sur la balançoire de velours rouge", cette jeune mannequin et courtisane du New York de la Belle Epoque a connu un destin tragique.
Poussée par une mère très ambitieuse à la moralité plus que douteuse, Eve débute comme modèle à l'âge de 16 ans. Elle prête son image de jolie et jeune fille candide et ingénue à des campagnes publicitaires pour des produits de beauté et connaît un succès fulgurant. Peu à peu, elle se prête à des séances de photos plus suggestives avant de se faire remarquer par le célèbre Stanford White, l’architecte du Madison Square Garden, dont elle deviendra l'égérie et la maîtresse...
L'ascension de "l'Eve américaine" sera aussi fulgurante que sa déchéance. Le récit revient sur le premier grand procès du siècle qui précipitera la chute d'Eve et la présentera aux yeux du public américain comme une figure de femme sulfureuse. 
A travers ses images aquarellées et un style narratif efficace, Nathalie Ferlut redonne vie au New York du début du XXème siècle avec beaucoup de sensibilité.

Vous pouvez voir quelques cases de la BD sur le tumblr de l'auteur, ici : http://nathalieferlut.tumblr.com/






Et quelques images de la "vraie" Evelyn Nesbit :





d'autres photos :

Spoiler:

La vie de cette femme a inspiré bon nombre de biographes, scénaristes et metteurs en scène. J'ai notamment appris dans le petit supplément de la BD que son histoire avait très librement inspiré le film La Fille coupée en deux de Claude Chabrol, en 2007.
On y apprend aussi qu'elle était tombée amoureuse du grand acteur américain John Barrymore, le grand-père de Drew !  


Etes-vous tentés par cette bande-dessinée ? Connaissiez-vous un peu Evelyn Nesbit ?

Je ne connaissais pas du tout Evelyn Nesbit, mais je suis très tentée par ce roman graphique!

Il devrait te plaire, Miss Virginia

Les dessins sont beaux, et l'histoire a l'air tout à fait intéressante. Merci d'avoir pris le temps de présenter ce roman graphique, Emjy !

Je l'ai lu ce week end et  , j'ai beaucoup aimé.

Ne pas oublier que dans le titre il y a le mot "cruel", et l'histoire relatée par N Ferlut est loin d'être banalisée.
L'auteure fait parfaitement sentir l'étau dans lequel se trouve coincé la jeune Eve, sous l'influence de sa mère et convoitée par tous ces hommes d'influence. Le personnage d'Harry K Thaw m'a vraiment fait peur, j'ai apprécié le point de vue de l'auteure de ne pas interpréter les relations entre les différents personnages, la relation entre Eve et Stanford White notamment, ou encore avec la mère.

L'ambiance New Yorkaise est bien traduite par les lieux et l'architecture de la ville ... La partie documentée en fin d'ouvrage est très intéressante, l'histoire d'E Nesbit a inspiré La fille coupée en deux de C Chabrol, également.

Emjy, que te dire si tu déniches à nouveau une BD aussi prenante, n'hésite pas!

Je suis ravie que tu aies apprécié cette bande-dessinée, Constance !  
Effectivement, elle est très cruelle. D'ailleurs, je lui trouve même quelque chose d'un peu gothique. Le personnage d'Harry K Thaw n'a à mon avis rien à envier à certains personnages de ce genre littéraire

J'ai pu lire cet ouvrage il y a quelques semaines, et j'ai beaucoup aimé !  

Comme le rappelle Constance, c'est un roman graphique cruel ; les dessins sont beaux, et l'histoire prenante.

Emjy a écrit:

J'ai notamment appris dans le petit supplément de la BD que son histoire avait très librement inspiré le film La Fille coupée en deux de Claude Chabrol, en 2007.

Le roman graphique est cependant plus intéressant et réussi que ce film de Chabrol, que personnellement je juge assez raté.

Ne trouvez-vous pas que le personnage de Stanford White est un peu exonéré de ses fautes ? Harry K. Thaw est certes très effrayant, mais Stanford White, bien qu'architecte de génie, est quelqu'un de profondément immoral.

Bref, c'est un sordide fait divers splendidement mis en scène.

Spoiler:

Constance a écrit:

Emjy, que te dire si tu déniches à nouveau une BD aussi prenante, n'hésite pas!

J'ai adoré cette bande-dessinée   
Je ne savais pas du tout qu'il s'agissait d'une histoire vraie avant de lire le dossier documentaire à la fin de la BD et la présentation d'Emjy, mais je trouve que cela rend cette histoire encore plus fascinante et triste : Eve Nesbitt était vraiment une très belle jeune femme, c'est dommage que sa vie ait été aussi horriblement gâchée  

Les dessins sont vraiment magnifiques, j'ai beaucoup aimé le mélange des genres qui s'en dégage : comme l'a dit Emjy, certains ont incontestablement un côté gothique, d'autres poétiques, horrifiques... Les dessins évoquant la carrière de modèle d'Eve m'ont également fait penser à l'Art nouveau et à Mucha, pour le côté nymphe drapée et aux cheveux longs défaits.
Globalement, je trouve qu'il se dégage une grande sensualité de cette BD, un côté glamour et l'ambiance new-yorkaise du début du siècle est vraiment bien retranscrite.
L'histoire m'a, comme je l'ai dit plus haut, énormément plu et horrifiée en même temps : on suit Eve seulement pendant 7 petites années mais il se passe énormément de choses, des sommets de la gloire aux abîmes (auto)destructeurs de l'héroïne et de son entourage. Comme vous, j'ai été assez scandalisée et révoltée par l'attitude de la mère d'Eve et horrifiée par celle de son mari, Harry Thaw (quel dingue   ). Le personnage de Stanford White me semble plus complexe, car il nous est dépeint comme un homme profondément immoral mais on ne le voit qu'à travers les souvenirs d'Eve, souvenirs dont on ne sait pas s'ils sont "vrais" ou pas vu ce qui se passe au procès...
Eve m'a semblé un peu trop naïve par moments, mais d'un autre côté je la comprends : combien de jeunes filles se sont brûlées les ailes à cause d'une célébrité trop rapide et trop étourdissante ? En plus, elle ne pouvait pas trop compter sur son entourage pour l'aider...
Enfin, j'ai eu presque l'impression de lire un documentaire par moments avec cette BD car je trouve que l'auteur nous apprend plein de choses sur le New York du début du XXe siècle, le monde des paillettes, de la justice... D'ailleurs, le petit dossier documentaire à la fin est vraiment une excellente idée, cela m'a donné envie d'en savoir plus sur Eve Nesbitt.

Bref, je pourrais parler encore longtemps de Eve sur la balançoire tellement cette BD m'a plu   Mais je concluerais avec un gros merci à Popila, qui m'a permis cette découverte  

Ravie de lire un autre avis enthousiaste sur cette bande dessinée !    Je trouve moi aussi que même si elle fait surtout figure de conte gothique (d'où son titre, justement), elle se lit presque comme un documentaire, sur le New York du début du XXème mais aussi sur les affres de la célébrité  

Contente que tu aies apprécié cette BD, Sandie !

La comparaison avec Mucha me paraît très juste !

Cette histoire a aussi inspiré le film La fille sur la balançoire (1955) avec Joan Collins dans le rôle d'Evelyn Nesbit. Elle est aussi un des personnages du film Ragtime de Milos Forman (adaptation d'un livre).

Je viens de finir ma lecture de ce roman graphique et je suis tombée sous le charme de cette histoire    Je ne vais pas revenir sur ce qui a déjà été dit : dessins magnifiques, narration, reflets de la vie des nouveaux riches de la société new yorkaise, combat entre les anciennes et les nouvelles fortunes,... Cette BD a de nombreux atouts et me donne envie de me plonger dans les autres oeuvres (si il en existe) de Nathalie Furlut.

Je suis devenue curieuse d'en apprendre davantage sur la vie de cette Eve et surtout curieuse de savoir ce qu'est devenue sa maquerelle de mère   

Je n'avais pas prêté attention à ce topic mais cette bd me tente beaucoup, et d'autant plus après vos avis si élogieux. J'ai lu il y a quelques années une autre bd de Nathalie Ferlut intitulée Lettres d'Agathe qui m'avait beaucoup plu !

@ Sookie : Ravie que tu aies apprécié cette BD   

@ Summerday : Tu me fais penser qu'il faudrait que je lise Lettres d'Agathe. Je n'ai entendu que des éloges sur cette bande dessinée.

Ca parle de quoi Lettres d'Agathe?

@ Sookie : Lettres d'Agathe est une histoire très triste. Ce sont les lettres d'une jeune femme pour sa mère disparue, et son incompréhension face à la haine et l'indifférence de celle-ci. Agathe, née après la seconde guerre mondiale, est l'enfant invisible de la famille au milieu de deux frères choyés. Dès la naissance, sa mère se désintéresse d'elle et refuse même de lui donner un nom. Elle  mettra presque une vie à découvrir les raisons de cette rancœur. On découvre plusieurs périodes de la vie d'Agathe, avec et sans sa mère. Les dessins sont très beaux et l'histoire très émouvante.

J'ai emprunté cette bd à la bibliothèque et j'ai adoré! J'ai un faible pour les dessins de Nathalie Ferlut et j'ai été à nouveau charmée, à la fois par le dessin et le thème. J'ai adoré cette histoire cruelle et amère, et j'ai été fascinée par les dessins qui s'inspirent souvent ouvertement de classiques de l'histoire de l'art. Il y a de nombreuses références à Toulouse-Lautrec pour n'en citer qu'une par exemple, et pléthore de références à l'art nouveau bien sûr (vous avez déjà cité Mucha entre autres). L'atmosphère générale m'a rappelé certains romans de Fitzgerald, dont Gatsby bien sûr, même si l'on est avant son époque.

Contente de lire un autre avis positif sur cette BD   

sookie a écrit:

Cette BD a de nombreux atouts et me donne envie de me plonger dans les autres oeuvres (si il en existe) de Nathalie Furlut.

C'est chose faite, je suis tombée par hasard sur Artemisia et c'est encore une belle découverte.

Lorsque Artemisia Gentileschi pousse son premier cri, le Caravage commence à développer son art magnifiquement ténébreux. La peinture est alors un art réservé aux hommes : une femme ne peut ni entrer à l'Académie, ni signer ses toiles, ni être payée pour elles. C'est pourtant ce que lune d'entre elles va faire Sa force lui permettra de triompher de tout et de tous, et de révéler au monde une peinture dont la puissance na rien à envier à celle des hommes. a écrit:

Cette BD dresse un portrait d'une femme forte qui va devoir supporter les Hommes et leurs règles. C'est très intéressant de se plonger dans cette histoire vraie, dans l'Art. Les dessins sont complètement différents de ceux d'Eve mais ils sont toujours très beaux.